dimanche 30 octobre 2011

The Artist : Ou comment faire du mauvais neuf avec du vieux


Minimalisme ne rime pas toujours avec simplisme. Fort heureusement. Et qu'arrive-t-il lorsque les deux se confondent ? Deux mots : The Artist.

Dans son propos, The Artist ne s'élève jamais bien haut, même lorsqu'il gagne en corps et robustesse scénaristique. Une question me vient alors à l'esprit, devant cette tentative échouée de faire aussi classe que les films américains ancestraux. Quel est le véritable intérêt, en terme de valeur ajoutée, de faire un film singeant les techniques du « glorieux » Hollywood des années 10, si ce n'est pour en faire une piqûre de rappel, maquillée en hommage, vis-à-vis des spectateurs nourris au Star Wars et Twilight ?

Dans les faits, les quelques instants brillants de réalisation retombent bien vite dans les méandres d'une narration perdue dans une léthargie de l'audace, se réfugiant dans la mobilisation de clichés du film muet mélodramatique, au lieu d'œuvrer pour un renouvellement profond du genre qui serait véritablement un des plus beaux hommages rendus au genre. Constituée de bonnes intentions, la relation sentimentale est « belle » à voir, mais fatigue quand même sous ses traits prévisibles.

D'OSS 117 à The Artist, Jean Dujardin fait un bon Sean Connery de substitution a la classe et au flegme prédestinés pour la cour anglo-saxonne. En toute logique, il peut donc jouer dans un film en noir et blanc où il aura à assumer un rôle de Don Juan du 7ème Art au physique de crooner.

Comme George Valentin, le héros que Jean Dujardin occupe, le réalisateur veut offrir du « beau », cassant par avance toute tentative de critique véhémente à l'encontre de sa progéniture. Antipathique, il se valorise au travers de son héros et conspue les pourfendeurs de la « moue », de la mimique faciale forcée, bref, du « passé ». Bon argument qui permet de se vautrer dans la vacuité narrative, au lieu d'innover et de se servir des codes pour faire un film actuel, vibrant d'actualité ; un peu à la manière de Drive...

Au lieu de ça, Hazanavicius (ouf !) sert un pastiche des plus insipides, sympathique si on laisse de côté le fait qu'il est quasiment impossible de ne pas penser à autre chose quand la majorité des situations paraissent des plus communes et rabattues en matière d'intrigue sentimentale. « Qu'est-ce que je vais faire en rentrant ? Faut vraiment qu'j'fasse du sport », soupirs, voilà ce que ça m'inspire. Rien de plus. Mention spéciale au chien qui a le mérite de tenir le meilleur rôle, quand même.
4/10

2 commentaires:

  1. Version courte : bah merde alors !

    Version longue : J'ai pour ma part passé un excellent moment avec ce film, qui m'a donné envie de me replonger dans ce vieux cinéma que j'ai trop l'habitude de snober. Un pastiche formidablement réussi, et qui témoigne d'un amour gigantesque pour cet art disparu. Bien sûr, les références sont lourdes à porter, mais il n'aurait pu en être autrement...

    Tu as raison de t'interroger sur l'intérêt de ce film en 2011. Mais, déjà le simple fait de "faire une piqûre de rappel, maquillée en hommage, vis-à-vis des spectateurs nourris au Star Wars et Twilight", ça me paraît déjà pas mal. Ensuite, le fait de réaliser un film avec un postulat aussi audacieux et qui reste fidèle à ses contraintes auto-imposées sans faillir, ça mérite le respect. Peut-être est-ce un film plus apte à susciter l'étonnement et le respect qu'une véritable émotion. Mais l'émotion, chez moi, elle était bien présente.

    La "vacuité narrative" n'est pas spécialement un défaut du film, mais est au contraire une partie intégrante du pastiche. Il faut se rappeler, que dans les années du cinéma muet, une écrasante majorité de films présentait des scénarios calamiteux et simplistes. Ces films ont subi l' "écrémage culturel" qui a eu lieu dans les décennies précédentes, mais à l'époque ces films étaient des événements, parce que le simple fait d'aller au cinéma, ce médium nouveau, était un événement en soi pour les spectateurs. Les blasés que nous sommes ont du mal à s'en rendre compte. Donc, cette petite bluette amoureuse simpliste m'a plu. L'intérêt, on l'aura compris, était ailleurs.

    Tu parles de Drive dans ta chronique : c'est un peu comme parler de torchon dans une review sur les serviettes, non ? Tiens d'ailleurs, je suis pas d'accord non plus avec toi sur Drive, chouette, je vais pouvoir épancher ma bile dans un autre post plus bas...

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  2. Niark niark niark, mes goûts touchent le fétide, ces temps-ci, tu crois ?

    J'ai aimé certaines scènes dans The Artist, je ne suis pas non plus catégorique. C'est l'ensemble, globalement, qui m'a déçu... Le côté artificiel de la chose... De vouloir créer la sensation avec un matériau usé et qui avait déjà subi beaucoup de (mal)traitement, au point d'en devenir délavé.

    Bref, je pense qu'il m'a manqué un peu d'âme "tendresse et bonheur" pour l'apprécier à sa juste valeur, en tant qu'objet de narration rafraîchissant et beau.

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