mercredi 24 février 2010

Redacted (Brian de Palma)


Beaucoup d'esbroufe pour peu de lumière. J'avais de quoi me méfier de ce film de Brian de Palma. Décrié à sa sortie pour sa gratuité et ses piètres qualités de réalisation, il semble effectivement avoir reçu les hommages qu'il méritait. Souvent vulgaire et outrancière, cette dernière et le scénario se taillent la part du lion pour creuser le giron réaliste du bourbier Irakien. Vulgaire, parce que l'objectif premier de la démonstration est l'ébauche d'une vraisemblance pour dévoiler l'âpre vérité d'un massacre et d'un viol perpétré par deux soldats américains sur une famille Irakienne. Alors que le sujet était on ne peut plus sensible, on pouvait s'attendre à ce qu'il soit traité avec scrupule, et non pas caricaturalement. Malheureusement, Brian de Palma n'échappe pas à la spirale des drôleries entre bourrus camarades de guerre, de telle sorte que l'on a parfois l'impression d'observer les élucubrations d'une chambrée échappée de Full Metal Jacket. Ajoutez à cela une grandiloquence manifeste pour rééquilibrer la balance par l'ajout d'un poids dramatique. Et que je te balance du Handel, comme un cheveu sur la soupe, en plans fixes qui doivent rendre compte de l'ennui des soldats Américains aux Checkpoints : une tourmente de calme avant l'attentiste bourrasque de la tempête.

Fait notable, une « nouvelle » façon de concevoir le cinéma, en tirant parti des nouvelles technologies de la communication et de la diffusion (YouTube, Chat, Camescope...), côtoie les codes éprouvés, lessivés et essorés du cinéma Hollywoodien. Ce mélange poisseux fait regrettablement bringuebaler en permanence le film d'un bord à l'autre. Se tirant la couverture, ces deux pôles qu'on peut juger antagonistes ont du mal à faire passer la pilule hallucinogène d'une (re)création du réel à l'intérieur de la sphère du septième art. Ainsi, Redacted s'inscrit dans la veine de films horrifiques et « catastrophe » comme Rec., Le projet Blair Witch ou encore Cloverfield. Déjà trop connu par le spectateur pour le surprendre, ce procédé d'illusion du réel ne suscite déplorablement plus le même émoi chez tout consommateur compulsif d'images qui exige toujours plus de surenchère pour rassasier ses attentes de grand spectacle. Cependant, De Palma mise sur la vérité nue, dépouillée de tout artifice mais pas de toute aspérité. Crue, son rôle devrait être d'édifier pour faire évoluer les consciences, ou pour le moins créer la polémique.

Malheureusement, même en s'immergeant le plus possible par l'autoroute de la version originale, la distance (critique) reste toujours de mise, et le parti pris d'une alternance entre plans professionnels et amateurs ne maintient pas longtemps le mirage aux yeux et à l'esprit du dupé qui lâche bien vite prise face à la supercherie.

Bien dommage, car la variété des moyens employés pour filmer et donc donner vie au « bloody » désert Irakien faisait montre d'un exercice de style salutaire. Regrettable, car cela ne parvient pas à sauver un film dont le propos est aussi grave et épineux. Hétérogène ou incohérente, ces qualificatifs désignent autant la mise en scène que l'intrigue qui, sans véritablement lasser, fait preuve d'invraisemblances, de verbiages et paradoxalement de longueurs qui ne font décidément pas de cette réunion successive de « clips » martiaux un véhément réquisitoire contre la guerre (tiens, original !) sous toutes ses formes, pour pleinement accrocher l'attention et le crédit du témoin-voyeur de ces subreptices barbaries.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire