lundi 16 janvier 2012

Hugo Cabret : Cabré après avoir été caressé dans le sens du poil


Harry Potter ? Non, Hugo Cabret

Un background carte postale
Paris. Ses goguettes, ses épiceries, ses bérets (pas verts, oh que non)… Celui rêvé et fantasmé de tous les américains. Celui de l'avant-guerre (2nde), le vieillot, le rustique, le pittoresque. Au cinéma, dans les jeux vidéo, partout... Paris est resté bloqué à un « âge d'or » dans l'inconscient collectif. De Ratatouille à The Saboteur en passant par Amélie Poulain... Celui qui fleure bon le chamarré, l'huile de moteur, le jasmin et les épices. Un Paris des faubourgs, pas encore trop colossal, typique du triple A français, charmant, synthétisant le rural et l'urbain. Sa population, affable et accueillante, populaire, ses commerçants serviables, ses autochtones débonnaires, goguenards, pas encore touchés de plein fouet par le formatage industriel de la Grande Amérique, et bien sûr ses femmes soumises... Oh pardon.

Le Paris hivernal de Scorsese
Tâche 2 en 1 : plus blanc que blanc ?
Hugo Cabret, ou comment réaliser deux films en un. Comment introduire un hommage vibrant à Méliès sans pour autant réaliser un documentaire fondamentalement barbant, peu vendeur, et pas du tout « business ». Attendez donc de voir le tapis se dérouler, sous les pieds du petit Oliver Twist des quartiers chocs, endimanché d'une pelure pour braver la neige, les assauts du temps et du travail qui le crèvent. Préparez vos larmes, votre « âme d'enfant », pour vous émerveiller de situations de pacotille, d'allers-retours incessants pour creuser le background du Paris carte postale d'Amélie Poulain façon années 30, où l'amour donnera réponse à tout, de toute manière, et finalement rendez-vous compte qu'il ne se passe rien pendant une heure, jusqu'à la résolution de la première intrigue. Débute alors LE vrai film, celui pour quoi Scorsese a lancé la machine à vapeur, celui qui n'aurait pas été « bankable » en ces périodes de fêtes, de son amour pour Méliès, qui passe bien évidemment par l'intermédiaire d'un personnage, éminent professeur chercheur dans une non moins prestigieuse université parisienne... Et qui fait la connaissance des gosses des rues, et de leur amour immodéré et réciproque (bien que soudain), pour ce qui semble être la clé de la deuxième intrigue du film, lancée tambour battant.

Indice : le nom de ce type essayant de ne pas voir flou en regardant de la 3D commence par un M.
Vous reprendrez bien de la 3D ?
Je me disais bien que ça commençait mal, avec cet écran d'introduction placé en interstice, composé de lettres capitales grises et épaisses, servant à mettre en valeur la 3D, mais faisant monstrueusement film d'action de seconde zone... Parlons-en, justement, de la 3D. Gênante, encore une fois, elle ne met pas en valeur toutes les scènes, et donne la curieuse impression de voir des collages et aplats de papier sur un fond fixe, un peu comme dans un Paper Mario où les figures plates se superposent au décor. Reste que certains effets sont convaincants, comme la neige qui voltige, mais il subsiste (à mes yeux) toujours la désagréable impression de voir du leurre, du faux, et de ne pas vivre une expérience aussi « traumatisante » qu'a pu être la démocratisation du cinéma à l'époque. 
Je n'y vois finalement qu'un argument cosmétique pour augmenter le prix du billet, et qui par ses contraintes (les lunettes, les défauts visuels), finira inexorablement par disparaître, du moins dans sa forme actuelle, purement marketing. Il n'est pourtant pas dit qu'elle ne subirait pas d'évolution, pour devenir « instantanée », sans périphérique.

"Wesh, t'as vu cousin, j'suis trop chanmé et j'dégaine du Colgate au centième de seconde"
Le péril de vouloir trop bien faire
Des enfants stars, le cinéma en a enfanté des tas. Mais quand ces mêmes enfants ne se sentent pas assez propulsés, ils surjouent, en font trop, veulent se faire une place à prix d'or. C'est le cas de Chloe Moretz, qui colle 36 expressions à la seconde à sa carrière d'actrice. Horripilante, elle monopolise l'attention par ses singeries, quand son comparse Asa Butterfield (Hugo Cabret) se débrouille plutôt bien dans le registre « oh, je suis un pauvre petit sans racine, aidez-moi ! » vaillant et débrouillard.
Aussi, c'aurait été bien de prendre du plaisir à retrouver Sacha Baron Cohen dans un autre rôle que celui qu'il s'attribue trop souvent : le bouffon de service. En campant un chef de gare, il donne à voir une autre facette, moins fofolle, moins beauf, plus reluisante, mais toujours comique et burlesque, car on ne se refait pas. En voyant le film en VF, je n'ai pas profité de la subtilité de son phrasé, mais ai pu goûter à ses mimiques délicates et rigolodes de bout-en-train (c'est pas ma faute c'est celle de l'UGC). Et c'est fort bien, car le comique de geste est très présent, même s'il rime souvent avec répétition, de la partie de cache-cache à la course-poursuite, avec Hugo comme avec d'autres drilles sans domicile.

Train de face + 3D = "effet wow" ?
Conclusion : Une histoire d'amour cinématographique
Ce serait faire mentir le réalisateur d'omettre que tout part de la bonne intention de rendre hommage à Méliès, et plus largement, au cinéma des frères Lumière. En filant la métaphore de l'Arrivée du train en gare de la Ciotat pour la faire parvenir à la 3D d'aujourd'hui, Scorsese défend son bout de gras et alimente son argumentaire par un enrobage de film de Noël bien illusoire. Frelaté, même, j'aurais envie de dire, tant le backgroud scénaristique et contextuel fait gadget à côté de l'hommage tonitruant à l'inventeur du Voyage dans la Lune. Bilan des courses, il s'agit d'une mise en abyme panégyrique plutôt emballante si on omet la première partie du film, et qui permet surtout de rendre à César ce qui appartient à César. Plutôt qu'un film originellement conçu pour conter l'histoire émouvante (période de Noël oblige, il faut pleurer dans les chaumières) d'un orphelin à la découverte de ses origines, Hugo Cabret est donc l'expression de l'amour sans bornes d'un réalisateur pour un autre qui lui a non seulement donné une définition du cinéma admirable mais a également contribué à ce que Scorsese se fasse sa propre définition en embrassant la carrière de cinéaste.
4/10

1895 - 1930's : Un clin d'oeil à l'accident de la gare Montparnasse

4 commentaires:

  1. C'est rigolo, je suis à peu de choses près d'accord avec la totalité de cette critique, et pourtant je lui attribuerais, si je devais jouer le jeu de la note sur 10, quand même plus que 4.

    Allez, disons 6,5.

    C'est du Scorsese familial et formulaïque, pas de doute, mais ça se laisse regarder... Je l'ai vu en 2D pour ma part, et je suppose que ton exaspération face à la 3D ratée du film a dû jouer son rôle dans le saquage final. Ca t'apprendra, oserai-je dire... On est en 2012 maintenant, et tu ne t'es toujours pas rendu compte de la vaste fumisterie que représente cette soi-disant révolution cinématographique ?

    Pour finir, même si Chloé Grace-Machin ne m'a pas non plus vraiment enthousiasmé ici, je continue à considérer que c'est une jeune actrice talentueuse et à suivre. Elle m'avait impressionné dans "Laisse-moi entrer" (le copier-coller américain de "Morse").

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  2. C'est rigolo, je suis à peu de choses près d'accord avec la totalité de cette critique, et pourtant je lui attribuerais, si je devais jouer le jeu de la note sur 10, quand même plus que 4.

    Allez, disons 6,5.

    C'est du Scorsese familial et formulaïque, pas de doute, mais ça se laisse regarder... Je l'ai vu en 2D pour ma part, et je suppose que ton exaspération face à la 3D ratée du film a dû jouer son rôle dans le saquage final. Ca t'apprendra, oserai-je dire... On est en 2012 maintenant, et tu ne t'es toujours pas rendu compte de la vaste fumisterie que représente cette soi-disant révolution cinématographique ?

    Pour finir, même si Chloé Grace-Machin ne m'a pas non plus vraiment enthousiasmé ici, je continue à considérer que c'est une jeune actrice talentueuse et à suivre. Elle m'avait impressionné dans "Laisse-moi entrer" (le copier-coller américain de "Morse").

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  3. C'est rigolo, je suis à peu de choses près d'accord avec la totalité de cette critique, et pourtant je lui attribuerais, si je devais jouer le jeu de la note sur 10, quand même plus que 4.

    Allez, disons 6,5.

    C'est du Scorsese familial et formulaïque, pas de doute, mais ça se laisse regarder... Je l'ai vu en 2D pour ma part, et je suppose que ton exaspération face à la 3D ratée du film a dû jouer son rôle dans le saquage final. Ca t'apprendra, oserai-je dire... On est en 2012 maintenant, et tu ne t'es toujours pas rendu compte de la vaste fumisterie que représente cette soi-disant révolution cinématographique ?

    Pour finir, même si Chloé Grace-Machin ne m'a pas non plus vraiment enthousiasmé ici, je continue à considérer que c'est une jeune actrice talentueuse et à suivre. Elle m'avait impressionné dans "Laisse-moi entrer" (le copier-coller américain de "Morse").

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  4. fuck... allez, un quatrième pour la route. Ca me fait le coup dès que je clique sur "Précédent"... Bon, allez, désolé et bon ménage...

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