lundi 15 août 2011

Le Prestige : Prestige d'agitateur(s)

Le prestige. Au sens propre, et au figuré. Strictement, vous connaîtrez sa définition en regardant les premières minutes. Au figuré, il vous faudra plus de temps pour se rendre compte de la maîtrise du réalisateur. En d'autres termes, il joue sur le prestige du cinéma de nous mener en bateau. A la manière de Memento, il entremêle les scènes entre aller et retour, prolepses et analepses, comme il battrait les cartes avec une idée précise de son jeu et de ce qu'il cache dans sa manche.

Nolan joue sur un thème répandu dans la littérature – puisqu'il faut rappeler que le film est une adaptation de nouvelle - et le septième art : la rivalité. Néanmoins, il le traite avec l'originalité de son savoir-faire de cinéaste, mêlant thriller, fantastique, et drame. De la même manière, il ne se limite pas aux relations conflictuelles régies par des affaires sentimentales, mais se sert des apparences pour détourner l'objet et le but de ce conflit général, jusqu'à enfermer les personnages dans le monde de la chimère et de la virtualité, en bref du spectacle, qu'il soit « magie » ou « science pure ».

Le film s'achève malheureusement sur une résolution prévisible, mais qui a pour mérite de laisser une fenêtre entrouverte par le doute autour du tour qui nous est joué, et qui va donc au-delà d'une vérité illusoire qu'on veut bien nous vendre, à nous, demandeurs crédules. Aussi, et c'est bon signe, sa relative complexité structurelle en fait un film à revoir pour tenter de faire s'évanouir l'illusion à défaut de résoudre un mystère dont on connaît (ou du moins on se doute) l'aboutissant.

Double, la médaille comporte donc sa face brillante, mais aussi son revers. Il est vrai que l'on peut s'ennuyer face à des scènes, qui, remises dans l'ordre, peuvent perdre de leur éclat (Shutter Island, où es-tu ?). Ce à quoi je rétorquerais qu'il faut savoir saisir ce que le réalisateur suggère en filigrane à travers une lecture sur plusieurs plans qui se fait grandement à l'aide des personnalités ambivalentes et antagonistes des personnages. D'ailleurs, en plus d'interroger sur le spectacle et par conséquent l'art cinématographique, il est également moteur de réflexions personnelles sur l'être intime et l'être social, sur l'être et le paraître... même si dit comme ça cela peut paraître risible, justement.

Alors, Le Prestige, de l'or ou du plaqué ? Pour moi, c'est un tour de passe-passe réussi qui emploie les moyens cinématographiques à des fins époustouflantes. Mais après tout, qu'est-ce qu'on en a à faire de mon avis ? Tout le monde sait que la vérité est ailleurs...

8/10


2 commentaires:

  1. Le dernier Nolan à ne pas succomber aux sirènes d'un certain cinéma d'action, et ce Nolan commence à me manquer, malgré la réussite de Dark Knight ou d'Inception. Je crois qu'Hollywood donne trop de fric à ce réalisateur, et c'est une mauvaise chose. Pourra-t-il garder suffisamment d'humilité pour nous re-pondre un film à la Memento ou même comme celui-ci, après la débauche de louanges des critiques et du public qui accompagnent chacune de ses nouvelles sorties ? Je l'espère mais j'en doute...

    Je ne me souviens pas avoir trouvé la fin prévisible. Mais bon, je n'avais pas non plus deviné la fin de Shutter Island donc je ne suis pas une référence :)

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  2. Ah, rassure-toi, je n'avais rien anticipé non plus en voyant Shutter Island. Mais avec Le Prestige, c'est autre chose. Déjà, je ne l'ai pas vu dans les mêmes conditions. Après, j'ai pris un petit temps pendant le film (pause de 2 minutes grand max) qui m'a permis de réfléchir sur les futures voies d'évolution du film. J'avais opté pour deux thèses, et la plus plausible des deux s'est réalisée. Du coup, oui, si on se laisse bercer par le flot on n'a pas vraiment le temps de réfléchir à une hypothétique fin... M'en prendre plein les yeux et les oreilles au ciné m'aurait aidé à être encore plus ébahi par le film.

    Après pour ce qui est du Nolan "actionnaire" (mouarf), je l'aime plutôt bien ; même s'il n'a pas le mystère d'un Lynch, en un poil plus abordable.

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